À mi-chemin entre religion et philosophie, le Confucianisme est le système de pensées le plus profond et le plus dynamique de la culture traditionnelle chinoise. Pendant des siècles, il a influencé l’économie, la politique et la culture de l’Empire du Milieu [1]. Les enseignements de Confucius, considéré comme le « premier éducateur de la Chine» [2], ont traversé les millénaires et survécu à la révolution culturelle, non sans raison.
Entre autres, le confucianisme est, depuis longtemps, profondément associé à la culture d’affaires chinoise, et les principes éthiques qu’il suggère gouvernent intrinsèquement les comportements des commerçants et des gens d’affaires chinois. Ses vertus sont assurément un facteur de succès en affaires, et c’est cette influence positive du confucianisme sur la pratique des affaires qui sera mise en lumière dans ce billet.
Entre autres, le confucianisme est, depuis longtemps, profondément associé à la culture d’affaires chinoise, et les principes éthiques qu’il suggère gouvernent intrinsèquement les comportements des commerçants et des gens d’affaires chinois. Ses vertus sont assurément un facteur de succès en affaires, et c’est cette influence positive du confucianisme sur la pratique des affaires qui sera mise en lumière dans ce billet.
Pour simplifier la chose, disons que le confucianisme peut servir de code éthique en affaires. Si ses préceptes sont d’abord destinés à guider les agissements de l'individus au sein de sa communauté, la plupart sont tout à fait transposables aux organisations modernes, premièrement, grâce à sa position par rapport au profit. La droiture et l’intégrité doivent passer avant le gain, et les avantages collectifs et valeurs spirituelles sont plus importants que les bénéfices individuels et les valeurs matérielles.
Ensuite, il y a le principe de moralité supérieure, qu’on pourrait aussi appeler leadership moral. Il indique que le leadership devrait être confié à des personnes « moralement supérieures », c’est-à-dire ceux qui pourront conduire le groupe en donnant l’exemple et qui agiront dans l’intérêt de leurs subordonnés, sans aucun égoïsme [4]. Ce principe est étroitement lié à ceux de succès collectif et de bienveillance, qui stipulent que dans l’interdépendance des membres d’un groupe, c’est seulement lorsque chacun connaît bien son rôle et a la volonté de le remplir de façon bienveillante que le succès sera réellement collectif plutôt qu’individuel. De plus, cette notion implique que chaque individu assume la responsabilité d’agir avec bienveillance, plutôt que de la faire reposer sur le groupe, où personne ne peut vraiment être tenu responsable des actions alors que tout le monde à sa part de responsabilité [4].
Il y a également un certain principe de confiance et de fiabilité : avant d’accorder sa confiance à d’autres, il faut s’assurer d’être soi-même fiable, puisque la confiance est quelque chose qui se mérite [4].
Ensuite, un autre principe complète celui de bienveillance, il s’agit de celui d’apprentissage perpétuel. Le Confucianisme insiste sur l’importance de l’éducation et de la connaissance morale. La recherche constante de connaissances permet de mieux remplir son rôle et de contribuer au succès collectif, tandis que les connaissances morales assurent la bienveillance des actions.
De façon plus générale, il est possible de regrouper les préceptes du confucianisme sous trois vertues principales. Le Ren, qui signifie bonté, bienveillance et humanité, aide à rétablir l’équilibre entre comportement éthique et poursuite du profit. Le Li, qui regroupe des principes éthiques guidant les relations interpersonnelles dans une hiérarchie, invite au respect et à la loyauté envers ses supérieurs, et fait de la qualité du service et de la politesse envers les clients des priorités en affaires. Puis le Xin, qui fait référence à l’honnêteté et à la fiabilité, devrait contribuer à former une société bienveillante grâce à des pratiques d’affaires harmonieuses [1].
Ce bref aperçu de l’influence confucianiste sur la pratique des affaires permet de remarquer un certain lien avec la notion occidentale de responsabilité sociale et environnementale (RSE) des entreprises. Ces deux notions visent à régulariser les actions de l’être humain qui, surtout dans un cadre capitaliste, semble inévitablement pencher pour son intérêt personnel plutôt que pour celui du plus grand nombre. Toutefois, si le concept de RSE des entreprises est en quelque sorte fabriqué de toute pièce et devient, de façon croissante, une simple façade qui en réalité n’est pas toujours respectée, les adhérants au confucianisme sont habités par ce système de pensées, qui est partie intégrante de leur identité depuis des générations [3]. Il y a donc assurément là source d’inspiration pour les entreprises, mais une chose est certaine: Si le Confucianisme peut, dans une certaine mesure, être imité au profit des affaires, sa profondeur, elle, est inimitable, et on ne l’acquiert pas si facilement.
Bonjour Charles Antoine,
RépondreEffacerJe te remercie d’avoir abordé le sujet sur confucianisme. Et je tiens aussi à te féliciter pour la qualité de ton article. Cependant, j’aurai quelques interrogations pour une confrontation d’idée.
Vous dites dans votre article que le confucianisme a influencé l’économie, la politique et la culture de la Chine. Il est, depuis longtemps, profondément associé à la culture d’affaires chinoises, et les principes éthiques qu’il suggère, gouvernement intrinsèquement le comportement des commerçants et des gens d’affaires chinois, etc.
Depuis 2010, la chine est devenue la deuxième économie mondiale, raflant la deuxième place qu’occupait le Japon depuis 1968 derrière les États-Unis(1).Elle est devenue la deuxième puissance économique, grâce à son ouverture à d’autres cultures, principalement les pays occidentaux.
Lors du plénum du parti communiste chinois en 2012, le président chinois, Hu Jin Tao veut combattre l’occidentalisation de la Chine(2). En effet, il s’inquiétait des efforts redoutés de l’occident à vouloir imposer sa culture et ses valeurs. Ayant aussi vécu en Chine, je vois aussi que les Chinois sont très prisés des produits occidentaux, particulièrement américains. Quelque part dans votre article, vous dites que le confucianisme a survécu à la révolution culturelle. La question est de savoir, le président Hu en voulant combattre l’occidentalisation de la Chine, comment va-t-il y parvenir du moment où son pays est déjà en échange constant avec l’occident ? Est-ce un processus irréversible qui emportera aussi le confucianisme?
Félicien Ndarata
1. http://www.lemonde.fr/economie/article/2011/02/14/la-chine-est-devenue-la-deuxieme-economie-mondiale_1479580_3234.html
2. Arnaud de La Grange. (2012). «Hu veut combattre l’occidentalisation de la Chine».
Effectivement, la mondialisation aura étendu le soft power américain un peu partout sur la planète, la Chine n’y fait pas exception. C’est d’ailleurs pourquoi, en parlant du Confucianisme, j’ai utilisé le terme « survécu»: Tout comme d’autres traditions chinoises profondément ancrées dans la culture – médecine traditionnelle, arts martiaux, spiritualités, etc. – le Confucianisme semble évidemment perdre en popularité, au profit d’une culture jeune et très «américanisée». Pour l’instant, ces aspects anciens et profonds de la culture ne font que survivre, et une bien faible proportion de la jeunesse s’y intéresse tandis que d’autres les tournent carrément au ridicule. Dans ce contexte, combattre l’occidentalisation de la Chine me semble être, malheureusement, un combat perdu d’avance.
RépondreEffacerMais ils essaieront quand même.
L’Empire du Milieu devra miser sur la croissance de bien d’autres choses que la simple croissance économique avant d’avoir une attractivité culturelle comparable à celle des États-Unis, emblème de la culture occidentale. En effet, même en devenant la première économie mondiale, la Chine conserve son lot de problèmes à régler. Entre autres, les domaines de l’hygiène/ santé publique/ pollution devront faire un réel «grand bond en avant» avant de rendre le mode de vie chinois attractif pour le reste du monde, particulièrement pour les individus des pays dits développés. Avant d’être en mesure d’offrir à la planète entière un «chinese dream» aussi «vendeur» que son équivalent américain, beaucoup de progrès devront être accomplis. Cela peut paraître simpliste, mais en Chine, seconde économie mondiale ou non, on jette encore ses déchets n’importe où et on fait ses besoins (#1 comme #2) à même le trottoir, en pleine ville et même par terre à l’intérieur de magasins à grande surface. Du moins pour les occidentaux, ça ne correspond pas tout à fait à un mode de vie idéal, aussi riche le pays soit-il.
Puis, il y a la question des vecteurs de communication de ce soft power. En plus d’avoir un modèle plus «universellement attractif», les américains sont en mesure de le diffuser abondamment, à peu près partout dans le monde. Cinéma hollywoodien, revues, internet, une multitude de canaux sont utilisés par les américains pour «proposer» leur culture. À ce niveau aussi, les chinois auront du rattrapage à faire. Ça vous arrive souvent, le vendredi soir, d’aller au cinéma voir un blockbuster chinois? Naviguez vous souvent sur des pages web chinoises? Le marché canadien vous offre-t-il bien des produits chinois? La réponse est évidemment non.
Si le PCC veut combattre l’occidentalisation de sa culture nationale, il devra, à mon avis, y investir massivement et s’assurer qu’elle traverse les frontières. La chine déborde de richesses culturelles, et c’est à cette culture extraordinaire qu’il faut que la Chine soit associée, et non à ses problèmes. Puis, avec le temps, il est également probable qu’une certaine régularisation se fasse d’elle-même. Vu le pouvoir croissant du pôle chinois, vu la quantité importante de Chinois un peu partout dans le monde, et vu leur pouvoir d’achat grandissant, tout porte à croire que de plus en plus de produits seront conçus pour eux. Avec le temps, nous allons probablement ressentir une présence croissante de la culture chinoise dans plusieurs domaines de notre vie quotidienne. Déjà ici à ULaval, par exemple, on peut remarquer un nombre grandissant d’individus s’intéressant au mandarin, toi et moi en sommes la preuve…
Bref, je crois que, pour préserver la culture chinoise, il ne faut pas simplement combattre l’occidentalisation des mœurs sur le territoire national. Le gouvernement devra bien sûr tenter d’accentuer le soft power chinois en le rendant plus attrayant de l’intérieur, mais il sera tout aussi important d’en assurer la diffusion partout dans le monde. Peut-être qu’ainsi, la culture pourra survivre à l’intérieur, mais aussi à l’extérieur du pays. Puis, après tout, nous sommes ici des Canadiens entrain de parler Confucianisme… Est-ce que ce plan serait déjà en marche?