La Thaïlande, qui possède la plus grande population bouddhiste theravada au monde, recense plus de 61 000 moines et novices bouddhistes. [1] L’an dernier, près de 300 d’entre eux ont été réprimandés ou encore bannis suite à des comportements fautifs, tel la consommation d’alcool, des relations avec des femmes ou même l’utilisation de magie noire. [1] Selon le directeur général de l’Office du Bouddhisme National, Nopparat Benjawatananun, une des sources responsable des mauvaises conduites des moines sont les disciples de ces derniers qui leur font don de cadeaux et d’objets de valeur, certains ayant même offert des voitures de sport..!
[1] Ce qui est bien entendu très superficiel et futile pour les besoins d’un moine bouddhiste, qui normalement n’accepte les donations que pour venir en aide aux plus démunis.
En 2013, un vidéo Youtube est devenu viral sur internet et a créé un scandale principalement auprès de la communauté bouddhiste, montrant des moines thaïlandais à bord d’un jet privé portant des lunettes soleil stylisées et un sac de voyage de la célèbre marque Louis Vuitton, attirant les critiques de toutes parts. Loin de s’attirer de la sympathie, ce même moine thaïlandais présent dans ledit vidéo est suspecté de plusieurs crimes dont possession de drogue, d’évasion fiscale, d’avoir eu des relations sexuelles avec une jeune fille mineure et d’avoir trompé plusieurs personnes dans le but de recevoir des dons, etc. [2] Ses actifs ont été saisis pour une valeur totale de 800 000$, comptant entre autres une Porsche et une Mercedez. [2]
Ainsi, plusieurs scandales ont surgi dans les réseaux sociaux au cours des dernières années, des activités réprobatrices de moines bouddhistes éclatant au grand jour, comme l’organisation de fêtes à l’intérieur des temples ou le visionnement de vidéos pornographiques par ces derniers.
Au cours de la dernière décennie, on a pu constater une très grande croissance économique provenant de la Thaïlande, qui a du même coup révélé la culture matérialiste des Thaïlandais, le tout correspondant avec une baisse radicale des activités spirituelles et religieuses. [3] Les temples bouddhistes auparavant au centre des villages, sont maintenant délaissés et font figure de bâtiments décoratifs. Alors qu’il y avait en 1980 un ratio de 11 moines pour chaque tranche de 1000 Thaïlandais, ce taux est aujourd’hui équivalent à 5 pour 1000. [3] Dans une étude de cas, l’auteur faisait mention d’une communauté de moines bouddhistes qui avait délaissé plusieurs traditions anciennes, tel récolter et distribuer la nourriture dans leur village et préféraient maintenant commander dans un restaurant local pour emporter. [3] Résister au mode de consommation de notre société d’aujourd’hui est définitivement un défi pour les moines bouddhistes qui, selon leurs principes, doivent mener un mode de vie frugal et de simplicité volontaire. Ceux-ci traversent donc une certaine crise, du moins cela suscite des questionnements de la part de leurs concitoyens quant à la valeur de leur spiritualité et sur leurs comportements illégitimes qui viennent défier des traditions ancestrales.
Que penser de ces nouveaux consommateurs qui ont, comme tout autre individu, le droit d’acheter biens et services, mais qui ont toutefois fait vœu de simplicité, discipline et partage? À l’ère de la consommation rapide et des nouvelles technologies, les communautés bouddhistes doivent repenser leur équilibre entre leur spiritualité et son intégration à la vie moderne…
« On ne diminue pas le bonheur en le partageant » - Bouddha
Pour visionner la vidéo Youtube : https://www.youtube.com/watch?v=sANFgwoJeic
Merci pour ce billet très interessant, on a tendance à idéaliser la religion bouddhiste et a penser que tous les moines bouddhistes ont la sagesse du dalai lama. Et pourtant, particulièrement en Thailande, le bouddhisme est en crise.
RépondreEffacerAutre exemple flagrant de la dérive du bouddhisme, l’Abbé Luang Poh Koon de Bangkok, le moine le plus riche, grâce au donation, mais personne ne se demande s’il est bon ou mauvais pour un moine de faire de l’argent.
On peut se demander qu’est ce qui a mal tourné dans le bouddhisme en Thailande ?
Le bouddhisme n’a pas su s’adapt. au temps modernes devenu plus complexes. Premièrement le bouddhisme est devenu religion d’État en 1901 et a donc abandonné son rôle de contestation du pouvoir. Puis petit à petit les moins se sont lancés dans la fiàvre de la consommation.
Par conséquent le nombre de pratiquants à diminué faute d’un clergé plus opulent qu’exemplaire. Les temples se vident dans les campagnes et les scandales à répétition ne font qu’accélérer les choses.
Peut-on parlé de crise du sangha (communauté)?
Louis Gabaude dans « la triple crise du bouddhisme en Thaïlande (1990-1996» nous montre qu’en la fin du XXème siécle, le bouddhisme thaï est « en proie à une crise profonde » , qu’il envisage sous la forme d’une crise morale et d’autorité , « signes d’une plus profonde crise du sens ».
Il commente des tableaux statistiques qui prouvent, que contrairement à ce que l’on peut voir (le nombre de pagodes et de robes safrans rencontrés), une forte et régulière baisse d ‘intérêt pour la vie religieuse. « De 1958 à 1994, soit une période de 36 ans seulement, la population totale du pays augmentait de plus de 136,77 % tandis que le nombre de bonzes ne progressait que 79,22 % ».
Ces chiffres « pulvérisent un cliché couramment admis chez beaucoup d’observateurs thaïs selon lesquels c’est la toute récente explosion de la société de consommation qui a précipité le désintérêt pour la vie spirituelle mise en œuvre dans la vie monastique ».
« La chute relative du nombre de moines précède de beaucoup les premiers plans de développement ». Autrefois la prospérité économique de la société étaient « communément interprétés comme des facteurs indispensables à la prospérité du bouddhisme », du sangha. Aujourd’hui, ces « mêmes facteurs apparaissent au contraire comme des facteurs de décomposition » « visibles sous ce qu’on peut appeler : les crises de l ‘autorité et de la morale.»
Il reste encore espoire de changer les choses, les deux universités qui forment les moines aide à réformer leur comportement et à s’adapter au monde moderne.
Jehana
http://base.d-p-h.info/fr/fiches/premierdph/fiche-premierdph-3564.html
http://www.lemondedesreligions.fr/actualite/crise-du-bouddhisme-en-thailande-29-01-2013-2933_118.php
Gabaude , « la triple crise du bouddhisme en Thaïlande (1990-1996»),BEFEO 83, p. 241-257.
http://base.d-p-h.info/fr/fiches/premierdph/fiche-premierdph-3564.html
Bonjour Jehana, merci d’apporter davantage de détails sur la crise du bouddhisme en Thaïlande. Il sera en effet intéressant de voir l’évolution de cette religion en Thaïlande dans les prochaines années et d’observer si les communautés sangha sauront pallier à la crise et s’adapter au monde actuel. J’aimerais conclure avec une ouverture en faisant un parallèle avec un pays voisin de la Thaïlande, la Birmanie. 88% de la population birmane s’identifie au bouddhisme Theravâda, soit environ 41,6 millions de croyants (1). Selon Skidmore, « pour une majorité de la population, ceux qui ne sont pas bouddhistes, ne sont pas réellement Birmans », c’est dire combien le bouddhisme fait partie intégrale de l’identité nationale. (2)
RépondreEffacerDepuis trois ans, la Birmanie s’ouvre au monde extérieur (plusieurs réformes économiques ont eu lieu en 2012) et le pays connaît une croissance annuelle de plus de 6%, ce qui bien sûr attire les investisseurs étrangers. (3) Dans le contexte où la « mondialisation » de ce pays est très récente et que le bouddhisme fait grandement partie de l’identité nationale, doit-on aussi se questionner sur le futur des moines bouddhistes birmans? Ces communautés doivent-elles s’inquiéter en regardant l’histoire de la Thaïlande? La religion bouddhiste semble tout de même plus ancrée profondément à mon avis, bien que la nouvelle croissance économique pourrait changer la donne…
Anthonie Maude Perron
(1) COUTURE, André. Notes de cours. SCR-2108 Le Bouddhisme. Université Laval. 2010.
(2) SKIDMORE, Monique (2005). Burma at the Turn of the 21st Century. Honolulu, University of Hawai’i Press.
(3) Armelle Bohineust, « La Birmanie à l’école de la croissance » dans LE FIGARO, disponible en ligne à l’adresse suivante : http://www.lefigaro.fr/conjoncture/2013/12/14/20002-20131214ARTFIG00271-la-birmanie-a-l-ecole-de-la-croissance.php, (dernière consultation le 22 avril 2014)